CePiCOP - 25.03.2025 - Epeautre – Enfin un vrai printemps !

Céréales
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L’épeautre a une capacité de tallage parmi les plus impressionnantes des
céréales

Ce ne sont pas les betteraviers qui me contrediront : cela fait plaisir de retrouver nos dates et nos repères !  Trois ans que les betteraves n'avaient pu être plantées en mars mais cette fois c'est fait ou en passe de l'être.  Côté céréales et plus particulièrement pour la culture de l'épeautre car c'est quand même le thème de ce chapitre, la situation est bonne dans l'ensemble mais mérite d'être détaillée. Suite aux récoltes tardives voire très tardives des betteraves, maïs et pomme de terre, la période des semis des céréales a été particulièrement longue. Heureusement, les conditions étaient bien meilleures que lors de l'automne 2023.  Cette fois, ce n'est ni la météo ni la portance des terres qui ont rythmé les semis mais bien la disponibilité des terres progressivement libérées par les récoltes des cultures de printemps. Les pluies sont arrivées par la suite et comme cela devient la norme, l'hiver a été très humide (286L/m²) principalement en janvier avec 170L/m² sur Gembloux.  Côté température, le minimum de la saison fut de -6°C les 13 et 14 janvier ce qui confirme la tendance générale des hivers plus doux et plus humides et cela alors que la météo est devenue plus imprévisible que jamais pour le reste de la saison. Bien malin qui pourrait dire si les mois d'avril à août seront secs ou humides.

Les conséquences visibles de cet hiver pour les céréales sont un aspect bien différent des terres selon les dates de semis. Plus précisément : entre les plantes qui ont pu atteindre le stade tallage avant l'arrivée des pluies importantes (15 décembre) et celles des terres semées plus tardivement qui ont été bien plus affectées que les premières par les phénomènes de battances et de terres trop vite refermées par les pluies. En effet, les semis d'octobre sont, cette année, très réguliers et les épeautres y ont déjà développé un bon nombre de talles (entre 5 et 10 par plantes).  Pour les semis plus tardifs (novembre et décembre), les zones sans végétation y sont plus nombreuses et les plantes n'ont encore que quelques talles.

L'hiver semble avoir pris fin il y a trois semaines avec le retour d'un temps plus sec et des températures plus clémentes.  Avec le concours des vents d'est et de sud, la surface des terres a rapidement durci pour parfois former une croute indurée qui peut perturber le développement des plantes.

Dans les cas où le tallage n'est pas jugé suffisant, le passage d'un rouleau Cambridge (cranté) peut s'avérer bénéfique.  Lors de printemps secs, c'est un outil efficace pour favoriser la reprise de végétation.

Pour les terres conduites selon les règles de l'agriculture biologique, les désherbages mécaniques sont à réaliser. Contrairement aux deux dernières saisons, les conditions sont idéales pour sortir les herses étrilles.  En conventionnel, c'est l'heure des rattrapages lorsque les désherbages d'automne ont laissé passer ici des matricaires, là-bas des véroniques…  Selon l'adventice considérée et son stade, un traitement mécanique peut là aussi, s'avérer suffisant. Si c'est le cas du mouron des oiseaux, ce n'est pas celui du rumex bien développé comme on en trouve en abondance dans les terres acides de nos Ardennes.

Côté engrais, les premières fractions ont été appliquées il y a souvent déjà plusieurs semaines.  Trop tôt sans doute, mais après deux printemps pluvieux et d'accès très difficiles aux terres, il était compliqué de résister lorsque celles-ci sont redevenues portantes.  C'est notre cas car nous avons apporté 50 unités d'azote le 5 mars sur nos essais. Dans notre situation, nous prévoyons d'appliquer une fumure complète de 140-160 unités en 3 fractions.  C'est une forme d'assurance pour satisfaire l'ensemble de nos variétés car dans la pratique les essais fertilisation des dernières années ont confirmé qu'en épeautre une fumure en deux fractions était tout aussi efficace et économiquement plus rentable.  Dans les terres plus froides (Condroz), la tendance est à appliquer de plus fortes teneurs (70-90 uN) ce qui par le passé s'est avéré adapté à ces conditions mais attention aux pertes et au risque de verse si l'ensemble des fractions « tallage + redressement+ montaison » dépasse 100 uN. Sulfasote, azote liquide ou granulé de N27, la forme de l'engrais a également son importance.  Pour la première fraction, nous avons opté pour du sulfazote car le soufre, élément essentiel pour la plante et très présent dans les pluies au siècle dernier (il y a 25 ans) est devenu plus rare. En outre, c'est un des éléments les plus facilement lessivés par les pluies hivernales.  Les céréales en manquent souvent lors de la reprise de végétation.  Il est encore trop tôt pour la deuxième application car la montaison ne débutera pas cette semaine. Les plantes d'épeautre les plus avancées se redressent mais la phase tallage n'est pas terminée.

L'hiver n'a pas été froid.  Cela s'observe à la structure des terres car le gel n'a pas pu faire son œuvre et l'on retrouve çà et là des blocs de terres compacts qui n'ont pas été délités par les gels (voir photo).  Le froid hivernal est un de nos principaux alliés dans nos régions et particulièrement pour la lutte contre les insectes et les maladies.  Il doit normalement mettre fin aux vols des pucerons mais cette année de nouveau, le thermomètre n'est pas descendu sous les -6°C dans les plaines et les adultes de pucerons ont sans doute survécu. Nous n'en avons pas encore observé mais nous restons attentifs. Pour les maladies fongiques, elles sont encore discrètes car le vent d'est freine leur développement.  Cependant, l'absence de froid n'a pas permis de réduire l'inoculum des rouilles et je pense en particulier à la rouille brune, très présente l'an dernier et que l'on devrait retrouver lorsque les températures moyennes repasseront au-dessus de 15°C.

Je vous souhaite une agréable semaine,

Guillaume Jacquemin


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